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23.09.2013

Art brut : ça press aux petits coins

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Le Venezuela manque de papier toilette. Pas nous. Et pour ceux qui aiment lire aux petits coins, la lecture ne manque pas. D’où l’utilité des revues de presse.

On peut choisir son canard (contemporain). Surtout quand celui-ci fait dans le hors-série avec rétro-pédalage dans le hors-les-normes. On peut mais c’est fatigant.

Et c’est fatigant aussi de vous conseiller (ou vous déconseiller), chers lecteurs animuliens, quand d’autres le font très bien à ma place.

Aussi, pour cette fois, permettez que je passe le crachoir (avec allégresse) au Schtroumpf émergent :

Art press vire à l’art brut… !

Après avoir depuis 40 ans conchié tout ce qui est de l’ordre de l’affectueux, du populaire, du sensible, du tripal, de l’expressionnisme, du spontané, de l’autodidacte et du «hors-normes», voilà donc qu’aujourd’hui, le magazine Artpress vient d’émettre un  hors-série sur l’art brut…

Certains voient là, comme un signe d’humanisation de la pensée artistique dominante, et s’en félicitent… Moi je vois plutôt là comme un reniement-récupération d’une vilénie record et d’un cynisme, d’une ignominie, et d’une impudence à vomir.

Que l’art brut soit devenu aujourd’hui un produit de spéculation intellectuelle et de placement financier me semble particulièrement odieux…

et je reviendrai sur cette question.

20:31 Publié dans art brut, Blogosphère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, hors série, hors les normes, schtroumpf émergent | |  Imprimer | | Pin it! |

17.09.2013

Pépère est un camembert

Sur ebay des fois on en trouve de belles! La preuve ce cahier illustré «écrit par pépère pendant la guerre 1914/18» (la mention, quoiqu’ancienne, semble d’une autre main).

Cliquer sur les images pour les agrandir

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Bon d’accord, Pépère aura du mal à se glisser dans l'interface entre l’art brut et l’art contemporain, cette nouvelle tarte à la crème qu’on voudrait nous faire avaler sous prétexte d’extension de la largeur de vue.

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A côté d’œuvres aussi considérables que les résidus de gomme ou les sculptures de fond de poche, Pépère, il faut en convenir, fait désordre.

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Il lui manque ce «je ne sais quoi ou ce presque rien» qui font le charme du raffinement maniaco-conceptuel prisé dans les banlieues en pleine gentrification.

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Pépère jure, Pépère tache, Pépère pue. Pépère ne fait ni dans l’effacement ni dans la dentelle. Pépère est un camembert. Fait à cœur.

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22:50 Publié dans art brut, Glanures, Images | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art brut, art populaire, guerre de 14 | |  Imprimer | | Pin it! |

16.09.2013

Les oliviers du Paradis

Pas d’oliviers chez M. Truc? J’ai voulu vérifier subito presto si cette inquiétude, manifestée récemment par Martine dans son commentaire tout gorgé de succulents souvenirs d’enfance, était fondée.

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Je suis donc aller tourner autour de ce Paradis qui a perdu sa première lettre mais qui est toujours si charmant quand même.

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Et bien, tenez vous bien. Non seulement des oliviers il y en a sous le soleil radieux du jardin de Léopold Truc mais j’ai aperçu dans mon zoom un bébé cerisier et un pitchot de pêcher avec un mini fruit dessus.

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Un peu comme si Monsieur Truc s’était octroyé de longues vacances et qu’il était revenu s’occuper en catimini de son domaine.

P1070053.JPGUn petit tour et puis s’en va, j’ai cliché de loin quelques pierres d’élection de Léopold Truc.

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Caroline Sury qui les avait remarquées lors d’un précédent et bref passage me les avait chaudement recommandées. Preuve du regain d’intérêt à propos de l’œuvre trucienne, cette émérite graphiste marseillaise a pondu de mémoire et sur la base des portraits du créateur, vus sur Animula Vagula dans ma note du 14 juillet 2012 (Léopold Truc, un paradis non truqué), un souvenir de visite réelle et imaginaire en forme de bd.

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21:24 Publié dans art brut, Images, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, léopold truc, caroline sury | |  Imprimer | | Pin it! |

11.08.2013

Quai Branly, ne ratez pas Ratton

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Ne visitez pas l’Exposition Coloniale disaient les surréalistes en 1931.

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affiche expo ratton.jpgVisitez plutôt en 2013 l’exposition Charles Ratton, L'invention des arts primitifs, au Musée du Quai Branly.

C’est l’occasion de découvrir la vie et la carrière d’un grand acteur du marché de l’Art Nègre qui est aussi une éminence grise de l’art brut. 

charles-ratton-par-dubuffet.jpgPetit rondouillard à lunettes, toujours bien sapé, Charles Ratton mouilla toute sa vie sa chemise pour gagner sa thune en rêvant de faire entrer ses chers arts primitifs au Louvre. Ce marchand de chez marchand possèdait l’art d’accrocher son wagon aux locomotives médiatiques.

En 1931, sous prétexte que «ça aiderait», il persuade Paul Eluard d’organiser la vente publique de sa collection (et de la collec André Breton), pendant cette fameuse Expo Colo sur laquelle les surréalistes gerbaient pourtant avec quelques raisons.

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Ceux-ci feront toujours confiance à Ratton même quand des rumeurs courront à son propos parce qu’il avait continué son business avec ardeur pendant l’Occupation.

A ses copains de la Brasserie Cyrano, Charles Ratton, en 1936, passe les clés de sa galerie pour une mémorable Exposition surréaliste d’objets où Breton se livre à une nomenclature subtile : «objets naturels, interprétés, incorporés, trouvés etc.».

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Des «objets perturbés» par l’éruption d’un volcan en 1902 sont visibles dans l’expo du MQB.

objets-perturbés.png Quantité d’expos et de ventes publiques sont encore à l’actif de Charles Ratton. Bien que tout ça soit hors de mon sujet, j’avoue mon faible pour La Mode au Congo de 1937 à cause de ces petits bibis.

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Chacune de ces initiatives rattoniennes a donné lieu à des affiches, catalogues et flyers dont beaucoup sont rassemblés dans l’expo du Quai Branly à côtés des pièces provenant de la Collection et du Bureau (reconstitué) de Charles Ratton.

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Pièces d’exception autour desquelles «on ne peut pas tourner» comme dit un râleur dans le Livre d’or. La plupart de ces œuvres d’art et de ces passionnants documents sont reproduits dans le catalogue de l’expo qu’il vaut mieux feuilleter avant la visite pour mieux déguster celle-ci.

La plupart sauf … quatre compactes et «grandiloquentes compositions» d’Hodinos (comme dit Jean Dubuffet auquel Charles Ratton les avait montrées)

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et une «broderie» d’un «fou», dessin de fils blancs sur tissu noir dont on retrouve la trace dans le bouquin de Marcel Réja, L’Art chez les Fous(1907).

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Mais ceci est une autre histoire que je continuerai la prochaine fois.

 

16.06.2013

Aloha Oléron

St Trojan les bains.jpgDans la série : les choses qui me rendent jalouse. Aujourd’hui : la chemise de Jean-Louis Faravel sur la photo de David Briand empruntée à un article de Sud Ouest. Sur le côté : des dessins de Paul Duhem.

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S’il n’y avait pas la PQR, on oublierait presque qu’il y a de l’art brut en province. JLF vient de la PQR. Le temps des loisirs venu, il est devenu organisateur de biennales. Son truc c’est L’Art partagé, un label qui lui permet de réunir régulièrement toutes sortes d’autodidactes s’adonnant ou s’essayant à la création d’art.

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Pas trop mon truc à moi généralement. Mais tout de même, en petite proportion, il y a parmi les poulains de Faravel des tempéraments hautement recommandables comme la chère mamie Grunenwaldt.

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Et quand Jean-Louis Faravel délaisse son Dauphiné habituel pour dériver vers la lumière saintongeaise, pourquoi ne pas le suivre? Vous avez donc jusqu’au 30 juin pour sortir vos belles liquettes hawaïennes et vos colliers de fleurs et vous rendre à la salle polyvalente de Saint-Trojan les Bains dans l’île d’Oléron où J.-L. Faravel, lui-même collectionneur, témoigne de ses choix.

15:36 Publié dans Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : jean-louis faravel, paul duhem, martha grunenwaldt, art brut | |  Imprimer | | Pin it! |

21.05.2013

L’abbé Fouré passe à l’Ouest

A peine quelques jours qu’un Animulien de bonne volonté nous signalait, par un commentaire, la sortie de l’ouvrage de Joëlle Jouneau sur L’Ermite de Rothéneuf dans la Collection L’Esprit du lieu éditée par les Nouvelles Editions Scala.

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Et déjà l’actualité nous rappelle au souvenir de ce diable d’abbé Fouré, l’ermite créateur des rochers sculptés. L’ermite et non l’hermite comme l’indique par étourderie le site de La Procurequi doit penser que l’art sacré s’écrit avec une hache.

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Soutane à part, l’œuvre de Fouré n’a pas plus à voir avec l’art sacré qu’avec les histoires de pirates dont la légende locale affubla ses rochers. C’est une belle et bonne vieille création d’art brut tout à fait impressionnante par son ampleur. Les deux pieds dans la matière ingrate du rocher. Ce qui ne l’empêche pas d’être fort visitée.

Aujourd’hui comme hier (du vivant même du sculpteur de tempêtes, avant 1910), par des promeneurs en quête de curiosités et de bons bols d’air. Une exposition des cartes postales éditées au début du vingtième siècle en témoigne jusqu’au 29 juin 2013 à la Bibliothèque municipale de Brest.

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Dans le cadre d’un «festival» intitulé L’Art brut à l’ouest où sont montrées aussi des sculptures de Pierre Jaïn et, parallèlement, des photos de Gilles Ehrmann à l’Artothèque que j’écrirais bien l’Artaud-thèque pour rigoler.

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Mais les rochers sculptés ce n’est pas de la rigolade et une asso se remue joliment pour la bonne cause de la falaise érodée par les marées, les fréquentations touristiques, les belles histoires sans fondement véridique et, depuis peu, par de romantiques lieux communs sur «la poésie des ruines».

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Un article récemment paru dans le journal numérique de Libération (18 mai 2013), sous le clavier de Bernadette Sauvaget, envoyée spéciale à Saint-Malo vous en dit plus. C’est de loin le meilleur papier que j’ai lu sur le sujet dans un quotidien depuis longtemps. Ironie du sort, la journaliste est en charge des sujets religieux à Libé. Non d’une rubrique artistique.

Bien documentée, elle n’en mène pas moins de front une présentation vivante et accessible de l’histoire de l’abbé, un aperçu précis sur l’œuvre et une enquête sur l’état actuel des problèmes posés par ce site indisciplinable. L’angle qu’elle a choisi pour intéresser ses lecteurs : le travail de proximité de l’association de protection et d’information.

joelle jouneau.jpgElle a, ce faisant, le mérite de brosser le portrait de l’animatrice de cette asso : Joëlle Jouneau elle-même.

Portrait qui manquait jusqu’alors.

 

19.05.2013

Prague 2013 : Jan Křížek sort de l’oubli

C’est une chose qu’on ignore parfois mais la Tchèquie existe et à Prague un Institut français où il se passe des choses. Tiens, le 6 mai dernier : on y présentait l’importante monographie d’Anna Pravdová sur Jan Křížek. Anna Pravdová, conservatrice à la Galerie Nationale de son pays, a des liens avec le nôtre et parle le français. Ce qui nous vaudra peut-être dans l’avenir des éclaircissements supplémentaires sur son travail.
podcast
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Entretien d'Anna Pravdová avec Anna Kubišta

sur Radio Prague (1) et (2)

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Sa monographie, qu’on dit nourrie et fort illustrée, accompagnera du 31 mai à la fin septembre 2013 une grande exposition Křížek (1919-1985), intitulée Jan Křížek et la scène artistique parisienne des années 1950.

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Dans le Manège du Palais Wallenstein, grosse perle baroque du quartier de Malá Strana.


Occasion pour les Tchèques de se réapproprier l’œuvre de cet artiste qui, après le Coup de Prague en 1948, vécut chez nous. cabane.jpgD’abord à Paris puis au fond de la Corrèze où il se bâtit une maison dans les bois. La notice Wiki sur Křížek est plutôt anorexique. Elle le décrit coincé entre surréalisme et art brut. Il serait surtout du genre inclassable et l’expo de Prague ambitionne de mettre en lumière sa captivante spécificité.

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Qu’on le veuille ou non, il appartient cependant à la légende de l’art brut. Son nom reste attaché à la période pionnière où ce concept découvert par Jean Dubuffet s’affinait progressivement.

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Avec Miguel Hernandez, Juva, Pierre Giraud et le controversé Robert Véreux, Jan Křížek eut les honneurs de l’une des 5 brochures historiques que René Drouin, galeriste de Dubuffet, édita pendant la période d’activité du Foyer de l’Art brut (15 novembre 1947/été 1948).

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Le texte de Michel Tapié qui figure dans cette plaquette ne cache pas l’origine «culturelle» de la découverte du «cas» Křížek.

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C’est le sculpteur cubiste espagnol Honorio Condoy qui lui signale (ainsi qu’à Henri Pierre Roché par ricochet) les sculptures du jeune tchèque, selon lui «tout à fait dans la même ligne» que les Barbus Müller.

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Le destin de Křížek montre ensuite que Condoy, Tapié et Roché ne se trompaient pas tout à fait sur la nature «brute» du talent du sculpteur. Deux faits sont là pour en témoigner. Un épisode iconoclaste au cours duquel Křížek détruit certaines de ses sculptures sous prétexte qu’il n’a pas les moyens de les transporter à la campagne. Une phrase révélatrice qu’il prononce quand il renonce à la création sculpturale (1962) pour devenir apiculteur : «enfin je suis guéri, je peux arrêter mon travail artistique».

art brut,surréalisme,jan krisek,anna pravdová,radio prague,rené drouin,michel tapiéJan Křížek à Gordes, été 1955

Photo tirée de la monographie d'Anna Pravdová

L’histoire retient que Dubuffet ôtera très vite les rênes de l’art brut des mains de Michel Tapié. Ce dernier, dans une note additionnelle à son texte de la plaquette Drouin, a conscience du problème posé par Křížek : «Tant pis pour ceux qui penseront que je brouille les cartes. Souvent trop des mêmes qui -avec raison- protestent contre les brimades, voire les honteux internements arbitraires des champions du verbe et de la vision ne voudraient, sans quoi ils ne marchent pas, voir en l’Art Brut qu’un asile ou une cage à singes (…)».

11.05.2013

L’Asphyxiante culture passe la nuit à Bègles

«La culture procure à qui en est doté l’illusion de savoir, qui est très pernicieuse, car un qui ne sait pas cherche et débat mais un qui croit savoir dort satisfait».

Cela fait un moment que j’avais pas lu ça. Je me replonge pas tous les jours dans Asphyxiante culture. J’ai tort. Si j’étais pas aussi cossarde j’apprendrais par cœur certaines des vérités finement paradoxales qui jalonnent ce petit livre de «libertés nouvelles» publié par Jean Dubuffet en juillet 1968 chez Pauvert (merci Jean-Jacques!).

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Par exemple celle-ci qui sonne comme un avertissement aux «intellectuels prétendus révolutionnaires» de l’époque et qui conserve tout son sel aujourd’hui :

«La position de subversion cesse bien sûr s’il advient qu’elle se généralise pour devenir à la fin la norme. Elle s’inverse à ce moment de subversive en statutaire».

Bien jeté, non ? De nos jours où c’est la mode de discréditer Dubuffet tout en lui faisant les poches, où bon nombre de ceux qui ont l’art brut à la bouche se croient fondés (au nom dont ne sait quelle modernité) à «promouvoir» celui-ci en imposant une régression théorique «visant à nier la coupure épistémologique de son inventeur», il est réconfortant de savoir qu’une Nuit des musées va être consacrée à Bègles à une lecture publique de larges extraits d’Asphyxiante culture.

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Réconfortant aussi de lire dans le dossier de presse de la Création Franche -puisque c’est dans cet établissement qu’aura lieu le 18 mai la performance- que «c’est un texte facile à lire, un manifeste dans lequel Dubuffet affirme que la culture (…) n’est plus au service des œuvres» et que «ce constat est encore terriblement d’actualité».

Qui c’est qui dit ça? Frédéric Maragnani. La voix qui portera ce soir là une pensée toujours novatrice qui ne demande qu’à s’envoler vers les âmes errantes de bonne volonté dont vous êtes (ou vous serez) chers Animuliens et Animuliennes de choc. Que vous ayez lu, mal lu ou pas lu du tout encore ce philosophe qu’était Jean Dubuffet.

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25.03.2013

Art brut : la réalité dépasse les fictions

Maintenant que j’ai mis le nez dedans, impossible d’en sortir. Dans quoi? Mais dans la collection des «Cahiers» de l’Art Brut, badame. Elle tabasse tout cette collection! On y revient toujours au hasard des méandres de l’actualité.

Samedi prochain (30 mars 2013), par exemple, l’Institut National d’Histoire de l’Art (INHA) ouvrira de 9h30 à 13h sa salle Walter Benjamin au séminaire du CrAB consacré à Des fictions d’art brut parmi lesquelles il y a Juva.

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L’occasion de se replonger corps et âme, pour réviser un peu avant, dans le n°21 des «Cahiers» évoqués plus haut. Cahier qui nous dit tout sur le cas de ce prince austro-russe, collectionneur de camées et de vases en cristal de roche, converti au silex dont il aime la matière au point de la sublimer en sculptures retouchées, peintes et soclées par ses soins.

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Jean Dubuffet consacra très tôt (en 1948) à cette œuvre née d’un cache-cache avec la science préhistorique, à cette œuvre révélatrice du pur langage des formes, un texte qu’André Breton compara à «un tube d’escalier en vis sans fin». Et une exposition au sous-sol de la Galerie René Drouin.

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A propos de «sous-sol», notons que Les Statues de silex de M. Juva, le texte de Dubuffet, se termine en boîtant sur ce mot. «Peu de gens», prophétise Dub, prendront garde aux statues de Juva mais «si quelques-uns pourtant se sentent ici touchés (…) par ce vent venant pour une fois non des points indiqués par la rose [des vents] mais de sous les pieds et de sous-sol (sic) – alors tant mieux».

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cahiers de la pleiade 1948.jpgC’est naturellement «de dessous le sol» qu’il faut lire. Dubuffet, dans l’édition originale ronéotée, a rectifié l’erreur à la main.

Celle-ci a été corrigée dans la version imprimée parue à l’été 1948 dans Les Cahiers de la Pléiade, revue dirigée par Jean Paulhan mais non -curieusement- dans le tome 1 de Prospectus et tous écrits suivants (1967) formaté par Hubert Damish.

Boucher_de_Perthes.jpgPinaillage, me direz-vous, mais c’est en pinaillant sur le sol et aux bords des rivières qu’Antonin Juritzky découvrait ses «pierres-à-figures» pour emprunter un terme à Boucher de Perthes (1788-1868), le père de la Préhistoire dont les théories, mélangeant vérités et divagations, donnèrent tant à rêver aux autodidactes.

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portrait de Juva.jpgAntonin Juritzky adopta le pseudo de Juva lorsque la science officielle l’expulsa de son délire pseudo-scientifique. Lui qui créait des «faux» qui ne dérivaient pas d’originaux fut convaincu de faire, en quelque sorte, des ready-made aidés et non des ready-made tout court! C’est arrivé à d’autres, à Robert Garcet notamment.

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Le CrAB serait bien inspiré de se tourner vers ces exemples significatifs plutôt que de nous en faire des «schizomètres» avec une blague pataphysicienne déguisée en calembour lacanien qui, au fur et mesure qu’elle dure, perd tout son sel.

BonusAntonin Juritzky est l’auteur d’un ouvrage publié en anglais par un musée hollandais qui, contrairement à ce qu’avance Jacqueline Roche-Meredith dans le N°21 (p. 70) des Publications de l’Art Brut, existe bien (depuis 1939) et ne relève donc pas d’un soi-disant «délire mythomane» de Juva.

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J’emprunte à cet ouvrage quelques photos et une introduction qui suggère une piste enfantine à la base des observations de Juva : «Walking in the spring of 1946 along a group of allotment gardens I was struck by a most charming scene. Playing children has marked off a kind of enclosure on the border of the field with little sticks, and inside this square they had laid a stone which was to represent an ox. Indeed, the stone -a flint- had the shape of a buffalo’s head (fig.1)».

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24.03.2013

Le vingt quatrième cahier sort en mai

Où j’ai la tête des fois je vous jure! Seule la décence m’interdit de le dire. Hier encore, je vous disais un peu vite que la série des «Cahiers» de l’Art Brut en était arrivée au numéro 22 et voilà qu’on annonce pour le mois de mai 2013 la sortie du numéro 24.

l’art-brut-24.jpgBeaucoup de noms italiens ou d’origine italienne parmi les contributeurs de cette nouvelle livraison consacrée à des «artistes» également italiens mais aussi suisses, américains, russes, français et ivoiriens.

Les plaisantins diront que moi aussi j’y vois rien mais ce n’est pas ma faute si j’ai raté l’épisode du Fascicule 23 : une erreur d’aiguillage sur les étagères surpeuplées de ma bibliothèque.

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Voilà ce qui arrive quand on oublie de vérifier dans les archives électroniques animuliennes!

cd-rom.gifCar votre petite âme errante n’avait pas oublié de célébrer en son temps la naissance du vingt-troisième. Je m’en aperçois un peu tard en retrouvant ma chronique du 15 octobre 2011 : L’Art Brut se met au vert. Et comme il est bon de suivre ses propres conseils, je me mets subito presto aux épinards comme Popeye.

epinards boites.jpgC’est bon pour la mémoire. Et pour l’italien.

16:30 Publié dans art brut, De vous zamoi, Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, collection de l'art brut | |  Imprimer | | Pin it! |